On le sait, Batman est un des personnages de comics les plus
populaires. Si on s'interroge sur les raisons d'un tel succès, la
raison paraît assez évidente : il s'agit là d'une des séries les
plus adultes et les plus matures dans l'univers très bon enfant du
comics book.
Après tout, les premières lettres de Gotham City ont une
ressemblance troublante avec le mot Gothique. Il s'agit donc de la
ville gothique par excellence, avec ses grandes tours surveillées
par des gargouilles, ses ruelles sombres et poisseuses, et, bien
sûr, son super-héros nocturne et tourmenté, Batman. Du côté des
super-vilains, nous avons également une brochette de personnages
tous plus torturés les uns que les autres, à commencer par le Joker
bien entendu, complètement dérangé et parfois même dérangeant. Je
ne peux m'empêcher d'avoir également une pensée pour Harvey 'Double
Face' Dent, l'ancien avocat vertueux devenu fou après que la moitié
de son visage ait été déformée par de l'acide pur.
Dans le même ordre d'idée, Batman est plus violent, plus radical,
que la plupart des autres super-héros et se situe clairement à
mi-chemin entre un Daredevil et un Punisher.
Cela explique que ce sont dans les pages de Batman que se sont
trouvées des planches qui comptent parmi les plus noires et
dérangées de la BD américaine (voir mes articles sur Frank Miller).
On pourrait également se référer au dernier Batman sorti au cinéma,
sombre, violent, avec notamment un Joker épouvantablement dingue et
flippant.
Sans conteste possible, le gros point fort de ce jeu Batman Arkham
Asylum, c'est de ne pas avoir hésité à utiliser cette noirceur
propre à ce comics pour livrer un jeu parfois brutal et sans
concessions. Du coup, le jeu se retrouve déconseillé aux moins de
16 ans, de façon assez logique (même si je suis persuadé qu'une
bonne quantité de mes collégiens y ont déjà joué^^).
Il faut dire que le choix de l'asile d'Arkham était très judicieux,
ce lieu hostile et terrifiant regroupant les pires meurtriers de
Gotham.
Dans ce jeu, la cruauté du Joker s'exercera souvent sur les pauvres
gardes encore présents dans l'asile après qu'il s'en soit emparé
suite à une fausse arrestation qu'il avait orchestrée de main de
maître, ou même parfois sur ses propres hommes, puisqu'il ne faut
pas oublier que le Joker est complètement dérangé et que tuer des
hommes à lui ne lui pose pas le moindre problème.
Le fait qu'il contrôle l'asile est une idée brillante, puisqu'il
apparait constamment sur les écrans de contrôle, faisant le pitre
tout en vociférant ou en se mettant en scène, ce qui donne
l'impression stressante qu'il est présent partout, tout le temps,
sans le moindre répit. J'ai adoré également ces moments où on joue
en infiltration et ou il parle à ses hommes, faisant le compte de
ceux qu'on a réussi à neutraliser, engueulant ou menaçant de mort
ceux qui restent.
D'une manière générale, c'est toute la charte graphique du jeu qui
a été conçue pour aller dans le sens du gothique à outrance,
mention spéciale pour Harley Quinn, la "copine" du Joker, qui a
abandonné ici sa tenue multicolore de bouffon qu'elle porte
d'habitude au profit d'une jupette sexy à souhait, avec deux
tresses blondes, des habits gothiques à mort, les yeux cernés de
noir. Elle est franchement inquiétante, la miss, sous cet
aspect...
Batman lui-même a une classe folle. La cape est longue, les muscles
proéminents, ce n'est pas du Batman gentillet qu'on nous a servi
là. Quand il effectue un "finish move" sur un adversaire à terre,
il lui explose littéralement la gueule d'un violent coup contre le
sol.
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Tu cognes ou tu te planques ?
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Comme Aurélien l'a justement signalé dans son article, le gameplay
de ce Arkham Asylum repose sur un mélange de trois tendances : le
beat'em all bourrin dans lequel on tape, cogne, on combote et on
finit ce qu'il y a à finir; l'infiltration avec nécessité absolue
de se planquer, d'utiliser le décor, l'élimination par derrière et
tout ce que s'ensuit, car les ennemis sont parfois armés jusqu'aux
dents et vous n'avez pas la moindre chance en frontal; et le jeu de
type aventure/exploration qui nécessite de fouiller partout pour
trouver moult secrets, obligeant à revenir sur ses pas quand on a
débloqué un accessoire qui donne accès à des zones de jeu
impossibles à atteindre la première fois qu'on était passé.
Et là, il faut avouer que les développeurs ont fait fort. Pour être
honnête, on ne peut pas dire que le jeu soit d'une richesse
exceptionnelle dans aucun de ses compartiments. La partie baston
pourrait refroidir les amateurs car il n'y a que très peu de combos
et on se contente finalement d'appuyer sans grands efforts sur deux
boutons pour venir à bout de dix types qui nous encerclent. La
partie infiltration se résume à utiliser un peu trop souvent les
mêmes méthodes, notamment les gargouilles, point idéal pour s'en
prendre aux malfrats.
Mais, malgré cela, ils ont réussi un petit miracle en rendant
toutes ces phases de jeu hyper jouissives. Il faut voir Batman se
suspendre tête en bas sur une gargouille. On attend alors qu'un
méchant passe en dessous et si on a acheté la compétence qui permet
de le faire, un appui sur une touche et une animation géniale vous
montre en train de descendre à la vitesse de l'éclair pour choper
le gars, le remonter, l'assommer un bon coup et le suspendre à la
gargouille.
Un bonheur^^.
Et tout est comme ça dans ce jeu. Toutes ces actions contextuelles
se déclenchent facilement, et le plaisir que cela procure au joueur
ne se perd jamais, tout au long du jeu.
Il faut ajouter à cela que la partie technique du jeu est
irréprochable. Les graphismes sont magnifiques, les animations
aussi, c'est une vraie claque qu'on se prend en jouant à ce jeu
d'un réalisme extrême, aux décors inspirés, fourmillant de détails
en tous genres.
Le mode "détection", sorte de super radar très utile au repérage de
tout un tas de choses, est une bonne trouvaille, même si le vieux
joueur un peu hardcore que je suis déplore un peu la facilité que
cela apporte à certaines phases de jeu. Etait-il vraiment besoin
d'indiquer les bouches d'aération en orange, ou d'autres choses
utiles pour le joueur ? On voit que l'effet de la casualisation est
passé par là et que les joueurs sont de plus en plus assistés dans
leur progression. Il aurait pu être intéressant et gratifiant de
trouver soi-même ses propres points de passage, sans qu'on nous
indique tout avec de grosses flèches.
Un autre défaut du jeu, c'est clairement le ratage des combats de
boss. Quelques séquences sont fabuleuses, comme celles avec
l'épouvantail, mais dans l'ensemble, il n'y a pas vraiment de
combats de boss proprement dits, plutôt des phases de jeu mettant
en scène un boss.
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Cesse de grogner, vieux joueur grincheux, tu as une merveille sous
les yeux
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J'abonde dans le sens de mon sympathique ex-élève et pourquoi pas
nouvel ami Aurélien , pour dire que ce jeu mérite largement les
éloges qui ont plu sur ses épaules de toutes parts, qu'elles
viennent de la critique ou des joueurs, tant il est vrai que ce jeu
est réussi.
De la part des développeurs, le respect scrupuleux de la licence
est partout présent dans le jeu, et on sent tout leur amour pour ce
personnage légendaire. J'en veux pour preuve toutes les choses que
l'on débloque au fur et à mesure dans le jeu, tous les secrets de
l'homme-mystère qui donnent accès à des biographies, des figurines,
des bandes sons...tout un tas de bonus que les passionnés de Batman
dévoreront. Les biographies sont très bien faites, et accompagnées
du numéro et de la date de première apparition du personnage
(certains remontent à 1939, vous ne rêvez pas^^).
Habituellement, les jeux sous licence sont de sombres bouses qui
exploitent honteusement un univers connu pour vendre, ici, c'est
tout le contraire. Le jeu ne se sert pas d'une licence, il sert la
licence. Là est toute la différence..